Le début de l’année 2025 a été le théâtre de nombreuses remises en cause de l’agriculture biologique : réintroduction des néonicotinoïdes, remise en cause de l’indépendance de l’Anses, assouplissement de la pulvérisation de pesticides par drone, recul de la loi EGAlim, vote du Sénat en faveur de la suppression de l’Agence BIO, etc

L’avenir de l’agriculture est au cœur des préoccupations politiques. Le Salon de l’Agriculture s’ouvre dans un climat de fortes tensions, de colère sourde du monde agricole, d’élections pour la représentation au sein des chambres d’agriculture et alors que la loi d’orientation agricole est sur le point d’être adoptée au Parlement.

A l’heure où les agriculteurs et agricultrices sont en proie à des difficultés financières croissantes  et alors que la part du bio dans les achats alimentaires des Français·es recule depuis la fin de la pandémie, l’avenir de l’agriculture biologique interroge.

Dans ces conditions, ce mode de production peut-il devenir le modèle agricole de demain ? Pour répondre avec mon collègue sénateur Daniel Salmon, sénateur d’Ille-et-Vilaine, avec la participation de la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique (FNAB), nous avons organisé ce colloque “Agriculture biologique, le modèle agricole de demain ?”, que vous pouvez revivre en intégralité ci-dessous.

Programme :

J’ai introduit le colloque en reprécisant les éléments de contexte politique, notamment le contenu de la loi d’orientation agricole sur le renouvellement des générations et la souveraineté alimentaire, tout juste votée au Sénat qui n’empêchera aucunement la disparition de la moitié des fermes d’ici 10 ans et aggrave notre dépendance aux pesticides et au engrais de synthèse.

J’ai précisé que l’agriculture bio allait devoir désormais progresser avec un fort vent de face, d’où le caractère indispensable de ce colloque pour se réunir, se serrer les coudes, réfléchir et avancer ensemble.

Philippe Camburet, président de la FNAB que je remercie vivement pour sa participation a complété cette introduction dessinant quelques perspectives plus réjouissantes pour la Bio après trois années difficiles :

Table-ronde n°1 : Quels leviers pour faire de l’agriculture biologique le modèle de production de demain ?

  • Christian Huygue, président groupe de travail bio contrôle de l’INRAE
  • Aurélie Catallo ,directrice agriculture France de l’IDDRI
  • Olivier Chaloche, céréalier bio dans le Loiret, membre du bureau de la FNAB
  • Sophie Tabary, éleveuse, présidente de Bio en Hauts de France

Animation : Daniel Salmon, sénateur d’Ille-et-Vilaine

Pour cette table ronde nous avons voulu nous projeter sur la problématique de la productivité et apporter des réponses à la principale critique formulée contre la Bio : l’insuffisance supposée de ses rendements et sa capacité à nourrir l’humanité. Nous connaissons les zones de force de la bio : maraichage, polycutlure-élevage, viticulture, petites exploitations bien implantées dans leur territoire et vendant en circuit-court, etc. Nous n’en parlerons pas ou peu ce matin.

L’objectif de la table ronde étant notamment de s’attarder sur l’enjeu productivité de l’agriculture biologique et l’enjeu de la conversion des grandes cultures qui était l’objectif de l’actuelle PAC.

Nous y avons évoqué l’avenir des produits phytosanitaires dans l’’agriculture en général et la nécessité économique de nous en passer.

Nous y avons envisagé les enjeux de bouclage de cycles, de fertilisation en bio des grandes cultures, de transition de territoires extrêmement spécialisés.

Nous avons enfin touché un mot des leviers, notamment le soutien public et la politique agricole commune.

Pour conclure la matinée nous avons écouté une carte blanche intitulée « La Bio pour la vie » de notre collègue député, mais également et surtout paysan et agronome, Benoît Biteau !

Table ronde n°2 : Les territoires au cœur de la transition agroécologique

  • Michel Demolder, président de la Collectivité Eau du Bassin Rennais, pour l’initiative « Terres de Sources »
  • Mathilde Roussel, vice-présidente en charge du Projet Alimentaire de Territoire, de l’Agriculture péri-urbaine et des circuits-courts alimentaires pour la Communauté d’agglomération de la Rochelle
  • Gilles Pérole, maire adjoint de la ville de Mouans-Sartoux
  • Jean-Luc Hallé, vice-président de Douaisis Agglo

Animation : Delphine Ducoeurjoly, chargée de mission Territoires à la FNAB

L’après-midi, nous avons tenu une 2e table-ronde consacrée à l’action des territoires pour favoriser la transition écologique.

Des perspectives réjouissantes, loin de la morosité sénatoriale et nationale, pour évoquer la protection de notre eau, de nos zones de captage grâce à la conversion des pratiques agricoles ou l’implantation de producteurs en bio.

Nous y avons évoqué également les efforts pour faire évoluer la restauration collective vers le maximum d’utilisation de produits biologique, voire vers le 100 %

Nous avons envisagé les bénéfices du bio, « les externalités positives » en bon jargon et la nécessité de les rémunérer pour les massifier grâce notamment au Paiement pour service environnementaux.

Le panel d’élu.es à cette table ronde est transpartisan de gauche à droite ne comptait pas pas de représentants des « Ecologistes ». C’est parfaitement volontaire, si nous sommes historiquement d’ardents défenseur de la bio, nous souhaitions illustrer que le soutien à l’agriculture biologique dépasse largement nos rangs.

Nos collectivités ne sont naturellement par en reste…

  • La métropole de Lyon, qui a quadruplé le budget consacré à l’agriculture en 3 ans pour accompagner 80 projets d’installation en agriculture bio et durable, pour atteindre l’an prochain le 100 % bio dont 50 % local frais et de saison dans les 66 cantines de ses collèges.
  • Strasbourg qui a lancé 33 PSE pour accompagner des agriculteurs bio.
  • Tours qui exonère de taxe foncière les agriculteurs bio.
  • Grenoble qui vise aussi le 100 % bio dans les cantines et expérimente la sécurité sociale de l’alimentation.

Table-ronde n°3 : Comment démocratiser l’accès aux produits biologiques ?

  • Pascale Hebel, Directrice associée chez C-Ways,
  • Jean Verdier, président de l’Agence Bio
  • Christelle le Hir, présidente du Directoire de La Vie claire
  • Christophe Barnouin, PDG d’Ecotone

Animation : Vincent Rozé, ex-président du Réseau “Mangez Bio”

Avec cette dernière table ronde, nous avons essayé de comprendre la dynamique de marché derrière la consommation de produits bio et tracer des pistes de solutions pour que la Bio ne soit plus un acte d’achat occasionnel mais bien un réflexe du quotidien.

Nous y avons évoqué les habitudes et la perception des consommateurs, et avons fait état des données de la consommation de produits bio à date et envisagé les perspectives de sa distribution en grande en moyenne surface via des marques industrielles dont nous avons interrogé la capacité à devenir grand public.

Une fois encore, l’idée était de se projeter au-delà des circuits courts et de la vente directe pour envisager la bio comme le modèle alimentaire global de demain.

Enfin, en conclusion, Juliette Duquesne, journaliste indépendante, autrice, conférencière qui a écrit de nombreux ouvrages notamment sur l’agriculture et sur l’eau a bien voulu officier comme grande témoin de ce colloque, a proposé une synthèse d’une riche journée d’échanges et ouvrir quelques perspectives bienvenues.