Cherchant à tout prix à éviter un vote sur la proposition de loi (PPL) du groupe LIOT proposant une abrogation du report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans, le gouvernement et sa majorité relative à l’Assemblée nationale viennent d’utiliser des articles de la Constitution et du règlement de l’Assemblée pour rendre cette PPL irrecevable. Ce scandale démocratique vient s’ajouter à tous ceux déjà observés sur cette question des retraites, où aucun vote n’a eu lieu à l’Assemblée et où le débat au Sénat a été totalement entravé par l’usage abusif d’articles du règlements.

En procédant ainsi, le gouvernement s’arroge le droit de décider ce qui serait ou non constitutionnel lorsqu’une proposition émane de l’opposition. Il appartient pourtant au Conseil Constitutionnel d’en décider. Par ailleurs, le gouvernement est d’ailleurs loin d’être exemplaire en la matière, plusieurs de ses lois ayant été retoquées par le Conseil Constitutionnel. Ainsi, cette manœuvre anti-démocratique revient à corseter encore un peu plus les droits des parlementaires, notamment ceux de l’opposition. J’ai donc utilisé la tribune offerte par les questions au gouvernement pour dénoncer cette dérive anti-démocratique qui nous entraîne un peu plus vers un régime autoritaire.

Voici le texte de la question :

Madame la Première ministre,
J’avais prévu de vous interpeller avec véhémence pour dénoncer les manœuvres auxquelles se livrent votre Gouvernement et vos alliés pour empêcher un vote en séance plénière de l’Assemblée nationale, un vote ne serait que symbolique, sur le report de l’âge légal de la retraite.

Mais au regard des événements consternants advenus ce matin à l’Assemblée, c’est avec une profonde gravité que je m’adresse à vous. Madame la Première ministre, les droits des oppositions politiques sont le fondement même de la démocratie. C’est à l’aune de ces droits qu’on juge la qualité de la démocratie. Notre pays, à tous les échelons national ou locaux, fait déjà pâle figure avec une hypertrophie des pouvoirs exécutifs et des assemblées réduites à leur seule fonction tribunitienne.

Pour tous nos partenaires européens, régime parlementaires rompus à la négociation et à une certaine culture du compromis, notre régime politique est une incongruité pour ne pas dire une aberration. Dernière preuve en date de cultures politiques très différentes, le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez remet son mandat en jeu après avoir perdu une élection municipale.
Rien de tel chez nous où le Gouvernement avance en écrasant toute contestation devant lui.

Ce matin, c’est bien plus que la bataille des retraites qui s’est jouée à l’Assemblée nationale. En torpillant une initiative parlementaire de l’opposition, en bafouant le droit d’amendement, en transformant le corset de l’article 40 en véritable étau, vous créez un précédent délétère qui menace de réduire à néant le droit d’expression déjà famélique des parlementaires.

Madame la Première ministre, vous êtes une démocrate, vous l’avez clamé ici même en juillet 2022 comment pouvez-vous tolérer la dérive autoritaire dans laquelle le président vous enferme ? Madame la Première ministre, vous pouviez entrer dans l’Histoire en ouvrant une page nouvelle de notre République parlementaire, vous y entrerez comme une fossoyeuse de la démocratie française…