Le 31 janvier, j’ai répondu au discours de politique générale du Premier Ministre. Malgré la mise en avant de sa jeunesse et une floraison d’annonces ces derniers jours, le cap est toujours le même : celui du dogmatisme libéral. Pire, le camp présidentiel prend un tournant franchement réactionnaire avec les dernières annonces sur l’école. Face à cette impasse, j’ai plaidé avec ferveur pour une solution : l’écologie. Vous pouvez retrouver mon discours en vidéo et sous format texte ci-dessous :

Réponse Déclaration de Politique générale de Gabriel Attal

Monsieur le Président,

Monsieur Premier ministre,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mes chers collègues,

Depuis 7 ans, Emmanuel Macron s’efforce à contre-temps d’imposer à la France l’amère potion néolibérale des années 1980.

Depuis 7 ans, à part pour signer des chèques en blanc aux entreprises, vous combattez la dépense publique, appauvrissez les collectivités locales, déplumez l’Etat et amputez les services publics.

Depuis 7 ans, vous avez enrichi les plus riches, abîmé les mécanismes de redistribution, amoindri les filets de protection sociale et fait exploser les inégalités.

Vous nous annoncez la poursuite de cette politique de casse sociale sans précédent, en vous attaquant au salaire minimum, aux minimas sociaux et en détricotant la loi SRU. Un Premier ministre du 7e arrondissement de Paris est l’exécutant zélé du président des riches. Tout cela coule malheureusement de source.

Cependant, nous n’avions pas anticipé que le plus jeune Président et le plus jeune Premier ministre de la Ve République soient à ce point, non pas conservateurs, mais réactionnaires.

Là, demeure l’imposture originelle du macronisme, qui s’était d’abord présenté comme un libéralisme chimiquement pur à l’anglo-saxonne et qui est aujourd’hui un trumpisme élégant de Rotary club.

La pandémie mondiale, la guerre en Ukraine et la crise écologique ont achevé de démontrer l’impasse de la mondialisation et de votre dogmatisme néolibéral. Or, sans lui, vous n’avez aucun cap. Vous vous contentez de gérer les crises, toujours de la même manière : réactionnaire, autoritaire et depuis peu populiste.

Emmanuel Macron devait permettre à chacun de vivre de son travail. Sept ans plus tard, les agriculteurs bloquent le pays, étouffés par la concurrence mondiale déloyale et la rapacité de la grande distribution. Face à une crise structurelle, dont votre idéologie est la cause fondamentale, vous vous engouffrez dans une dérive populiste qui fait de la protection de l’environnement et de la biodiversité, l’épouvantail des difficultés du monde agricole. 

Vos premières mesures n’apportent aucune réponse pour garantir un revenu décent aux hommes et aux femmes qui nourrissent la France ou pour renforcer notre souveraineté alimentaire. Vous vous gardez bien de combattre le libre-échange, de réinstaurer des quotas ou de refondre une PAC qui engraisse surtout quelques privilégiés.

Vous n’avez rien fait pour réhausser les salaires, renforcer le pouvoir d’achat des Françaises et des Français et leur permettre, notamment, de se nourrir correctement avec des produits locaux et de qualité. Une condition sine qua none de la rémunération décente de nos agriculteurs. Rien non plus pour favoriser l’installation et la transmission, qui passera par une indispensable réorganisation du travail.

Emmanuel Macron avait en 2017 une certaine vision des évolutions du travail. Sept ans plus tard, cette vision s’est perdue dans le costume gris d’un comptable triste. Vous ne considérez le travail que comme un coût. En refusant d’indexer les salaires sur l’inflation, en ne revalorisant pas les fonctionnaires, en reculant l’âge de la retraite, vous dévalorisez le travail tout en prétendant réhabiliter « la valeur travail »… Cherchez l’erreur.

Emmanuel Macron devait être le président du « renouveau démocratique ». Sept ans plus tard, faute de pouvoir se nommer lui-même, il nomme un Premier ministre, qui ne sollicite même pas la confiance du Parlement. Aucun pouvoir républicain n’a gouverné de manière aussi centralisée, aussi autoritaire, avec un tel mépris du peuple et de tous les corps intermédiaires. Voilà votre réponse à la crise des gilets jaunes, dont les doléances sont encore sous scellés…

Emmanuel Macron promettait “une République exemplaire”. Sept ans plus tard, on ne remanie plus pour exfiltrer MAIS pour faire entrer au Gouvernement des ministres mis en examen…

Emmanuel Macron avait fait de l’éducation et de la culture « son premier chantier ». Sept ans plus tard, vous faites vous-même le terrible constat de la crise du métier de professeur et vous n’annoncez rien pour le revaloriser. Pire, vous déployez des écrans de fumée sur l’abaya, vous vous égosillez sur la laïcité à l’école tout en laissant prospérer le séparatisme scolaire de l’enseignement privé catholique. Vous en faites presque un modèle pour l’école publique, en revenant sur les acquis de mai 68 à coup d’uniforme obligatoire, de respect de l’autorité et de service universel ou civique.

« Action, réaction », nous voici revenu au modèle rééducatif du tyrannique directeur Rachin dans les Choristes. Voilà votre réponse à la nouvelle crise des banlieues qui a agité notre pays l’été dernier. Voilà votre réponse à notre jeunesse en quête de sens dans « le vieux monde qui se meurt » théorisé par Gramsci.

Ce n’est même pas une politique de boomer, c’est une politique d’avant-guerre ! La jeunesse de ce pays et de ce continent se demande dans quel monde elle vivra et vous ne faites pas le lien avec la baisse de la natalité. Déconnecté, le président de la République, dans un discours que l’on croirait sorti du lendemain de la “Grande guerre”, appelle à « réarmer démographiquement la France » sous-entendu pour faire des soldats et des cotisants pour notre régime de retraite…

Vous annoncez que la santé mentale de la jeunesse sera votre « grande cause nationale ». On pourrait saluer l’initiative si la précédente « grande cause » ne s’était pas achevée en un soutien abject à Gérard Depardieu. 

Emmanuel Macron devait être le barrage à l’extrême droite. Sept ans plus tard, il a ouvert toutes les vannes. La loi immigration demeurera comme une indélébile déchéance politique et morale. Avant de vous présenter devant le Parlement, vous avez soigneusement attendu un mois la décision du Conseil constitutionnel sur laquelle vous comptiez pour censurer les pires atrocités de votre pacte faustien avec la droite extrême et l’extrême droite. Mais personne n’est dupe : le même ministre de l’Intérieur incarnant votre dérive illibérale siège toujours à vos côtés et votre pacte de Gouvernement tacite avec les soit-disants Républicains demeure.

Mes chers collègues de droite, je vous le dis gravement, vous avez, depuis plusieurs semaines, critiqué la Constitution du général De Gaulle avec la même virulence que les héritiers de Pétain. Vous êtes sur une pente glissante, qui vous mène hors du champ républicain. Si vous refusez de l’entendre de ma bouche, entendez-le de celle de Xavier Bertrand. 

Monsieur le Premier ministre, je n’ai pas encore parlé d’écologie, du moins dans la conception ensilottée que vous vous en faites. Mais tout ce que je viens d’évoquer:

–  le renforcement du pouvoir de vivre,

–  la réorganisation du travail,

–  le renouveau démocratique,

–  le renforcement des libertés publiques et de l’Etat de droit,

–  un regard ouvert et accueillant sur le reste de l’humanité,

–  un projet éducatif qui fait confiance à notre jeunesse,

–      un projet pour lui redonner espoir dans l’avenir,

C’est ça l’écologie.

L’écologie est la vision qui vous manque pour, à partir des territoires et de l’innovation locale, recréer de l’activité économique et recouvrer notre souveraineté :

–  grâce à une transition agricole pourvoyeuse d’emplois et rémunératrice pour les producteurs ;

–  grâce à une réindustrialisation vertueuse, concentrée sur nos besoins essentiels et pensée dans une logique circulaire ;

–  grâce à la transition énergétique, plus compétitive et plus souveraine que le nucléaire ;

–      grâce à une production de logement biosourcés, économe en énergie et reposant sur des filières locales, etc

L’écologie est la solution pour résorber la fracture territoriale en repensant les mobilités, l’urbanisme et en permettant à celles et ceux qui le souhaitent de quitter les métropoles.

L’écologie est la solution pour contrôler notre dépense publique grâce à des investissements intelligents et à la sobriété.

L’écologie est à elle seule une politique de santé publique.

L’écologie est la solution pour enfin dépasser nos divisions, nos haines, nos égoïsmes et se mobiliser ensemble dans un objectif qui concerne l’avenir de l’humanité tout entière.

L’écologie est LA solution.