Le 14 mars 2025, je me suis rendu, avec Cyrielle Chatelain et Jérémie Iordanoff, député.es écologistes de l’Isère, à la maison d’arrêt de Grenoble-Varces. Nous étions accompagné.es d’une journaliste correspondante à l’AFP et au Monde. Nous avons pu circuler librement dans l’établissement et avoir accès à tous les lieux demandés. Nous sommes resté.es 4h30 sur place. 

Lors de cette visite, j’ai pu échanger avec l’équipe de direction de l’établissement, plusieurs surveillants ainsi qu’avec deux personnes détenues. J’ai également pu visiter les différents quartiers du centre pénitentiaire: le grand quartier, le quartier mineur, le quartier disciplinaire, la cour de promenade intérieur et la salle de classe. 

Etat des locaux:

Depuis ma dernière visite en août 2019, j’ai pu constater qu’un certain nombre de travaux avaient été réalisés, notamment le cloisonnement des WC dans les cellules et le cloisonnement et la rénovation des douches. J‘avais d’ailleurs adressé une question écrite au garde des Sceaux en 2023 pour l’interpeller sur les conditions de détention et la nécessité de travaux, comme le demandent la direction et le barreau de Grenoble.

Cependant, encore beaucoup reste à faire: accès à une vue extérieure pour la pièce de promenade du quartier disciplinaire, rénovation des cellules… Aujourd’hui, et bien que des travaux de rénovation soient en cours, les locaux restent très vétustes.

L’équipe de direction a réfléchi, avec les personnels et les personnes détenues, à l’amélioration du confort thermique dans les cellules, où il peut faire jusqu’à 35°c l’été: ajout d’une VMC, création d’une zone humide avec évacuation d’eau, mûr respirant, réaménagement des fenêtres, création de rangements supplémentaires… Ce projet attend aujourd’hui un financement de l’Etat pour pouvoir être réalisé.

Surpopulation carcérale:

Le taux d’occupation du centre pénitentiaire Grenoble-Varces est aujourd’hui de 180%: 384 personnes y sont détenues sur les 232 places prévues. Il s’agit du chiffre le plus haut depuis 2014. Parmi les personnes détenues, 70% d’entre elles sont condamnées et 30% sont prévenues. La durée moyenne de détention est de 6 mois.

Les personnes détenues, qui devraient pouvoir être seules dans leur cellule, sont systématiquement deux. Trois d’entre elles sont contraintes de dormir sur un matelas au sol, malgré les efforts de la direction pour les supprimer.

Cette surpopulation carcérale massive porte des atteintes fortes à la dignité des personnes détenues. En effet, les établissements pénitentiaires étant dotés de moyens matériels, humains et financiers définis en fonction de leur capacité d’accueil initiale, les conditions de détention se dégradent rapidement lorsque cette capacité d’accueil est dépassée. Les conditions de travail des personnels sont aussi très difficiles, notamment en raison de l’insuffisance des effectifs. La promiscuité quotidienne des personnes détenues entre elles, en plus d’être contraire au droit, est très souvent vectrice de tensions que les personnels œuvrent à désamorcer au quotidien.

Conditions de détention:

Lors de ma visite, j’ai pu échanger avec les équipes de direction et un représentant du personnels ainsi qu’avec deux personnes détenues sur les conditions de détention au centre pénitentiaire Grenoble-Varces:

  • l’accès aux soins pour les personnes détenues: présence d’une unité de 14 places avec suivi psychologique, consultations de soignants du CHUGA sur place…
  • l’accès à l’éducation: amélioration de l’offre scolaire, projet d’augmentation des effectifs des classes et de doublement des effectifs inscrits en formation professionnelle pour répondre à une forte demande…
  • l’accès aux droits : possibilité d’accompagnement par une assistante sociale une fois par semaine, déplacement des agents de la préfecture de l’Isère pour faciliter l’établissement des papiers d’identité…
  • l’accès au travail : 2 SIAE embauchent aujourd’hui des personnes détenues à Varces: conditions de travail, rémunération, développement des compétences…
  • l’accès au numérique: projet de déploiement de tablettes dans toutes les cellules afin, notamment de pouvoir faciliter les démarches des personnes détenues et la transmission des informations.
  • la prévention du suicide: prévention auprès des familles, accompagnement renforcé par la direction et les agent.es, suivi des recommandations du groupe d’études composé d’étudiant.es et de personnes détenues…
  • l’accès aux activités culturelles et à vocation éducative:  cours d’informatique, suivi d’ateliers sur l’égalité femmes-hommes, accès à la bibliothèque, interventions ponctuelles d’artistes, intervention régulièrement d’une association d’accompagnement à la parentalité, préparation au code de la route, ateliers de philosophie, cours de théâtre…
  • l’accès aux parloirs avec les proches et les avocat.es : seuls 6 parloirs très exigus sont disponibles, ce qui est largement insuffisant par rapport aux besoins. Ils sont par ailleurs inaccessibles aux personnes à mobilité réduite et sont totalement inadaptés pour des visites avec enfants.
  • l’accompagnement des mineurs (16 mineurs sont actuellement hébergés au centre pénitentiaire): accès à la formation et à un suivi de santé, travail des éducateur.ices spécialisé.es…
  • la préparation à la sortie: développement d’un pôle numérique de réinsertion, accompagnement par une assistante sociale et par pôle emploi dans les 6 mois précédant la sortie de détention, aide à la recherche de logement…
  • les conditions d’exercice, difficiles, des personnels pénitentiaires: sous-effectif important, souhait de pouvoir conserver le “saut-de-nuit”…

Mais aussi sur le groupe de travail créé sur les violences intra-familiales et animé par le SPIP, l’application des peines, l’accessibilité de la maison d’arrêt…

Je remercie l’équipe de direction, Monsieur Patrick Malle et Madame Laurence Denis pour leur disponibilité et leur coopération.

Je continuerai à me déplacer dans les centres de privation de liberté, comme l’autorise la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes. Ces visites sont importantes et permettent de pouvoir constater et dénoncer les éventuelles irrégularités commises dans ces lieux inaccessibles aux autres citoyen.nes.

Crédit photo en une : Emiliano Bar