Partout en France, les services de soins connaissent une situation grave. Les pénuries de personnel sont partout, des déserts médicaux aux grands centres urbains dont les urgences ferment de plus en plus. La seule réponse des pouvoirs publics a été le Ségur, le recours à des heures supplémentaires et de compter sur la dévotion des soignants restants. Ces derniers sont de plus en plus épuisés et sont très nombreux à songer à partir à leur tour. Alors que l’été s’annonce très compliqué, notamment à l’aune d’une nouvelle vague de COVID-19 et d’une violente canicule, j’ai interpellé le ministre de la Santé et la ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche sur la situation iséroise, à travers deux questions écrites.

La première d’entre elle soulève les problèmes posés par la fermeture nocturne de presque toutes les urgences du département, qui, en reportant la pression sur d’autres hôpitaux, les fait chuter à leur tour, comme des dominos. Des mesures de long-terme doivent être prises pour arrêter l’hémorragie de soignants et en attirer de nouveaux. La seconde porte sur les futurs soignants et la situation difficile des élèves en études de médecine. L’académie de Grenoble compte trop peu de places en deuxième année, conduisant à de fortes inégalités avec les autres académies et à un manque cruel de soignants. Vous pouvez en prendre connaissance ci-dessous :

1/ Situation critique des hôpitaux grenoblois :

M. Guillaume Gontard interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur la situation critique des hôpitaux, notamment dans l’agglomération grenobloise.

Partout en France, les services de soins sont dans un état extrêmement préoccupant. Les professionnels alertent sur une situation inédite et évoquent un été sous très forte tension. En mai 2022, un recensement réalisé par le service d’aide médicale urgente (Samu) et les urgences de France faisait état de 120 services d’urgences en difficulté, c’est-à-dire qu’ils se trouvaient soit en fonctionnement dégradé, soit carrément fermés, un chiffre qui continue d’augmenter depuis lors. Le 22 juin 2022, une étude de la fédération hospitalière de France annonçait quant à elle que 85 % des centres hospitaliers universitaires (CHU) et régionaux (CHR) étaient contraints de fermer temporairement des lits faute de personnel !

Si la prise en charge des patients est difficile dans tous les domaines, celle aux urgences est la plus grave car il s’agit de services en première ligne. Avec très peu de prise de nouveaux patients en médecine de ville et des urgences qui ferment leurs portes les unes après les autres, nos concitoyens ne savent plus où aller pour se faire soigner et sont contraints de parcourir de longues distances. Or, dans les cas les plus graves, chaque minute compte.

L’aire urbaine grenobloise est un bon exemple de cette situation : en quelques mois, les services d’urgence ont fermé les uns après les autres. Désormais, les urgences pour adultes du CHU de La Tronche, du CHU de Voiron et du groupe hospitalier mutualiste de Grenoble sont toutes fermées la nuit ! Seules celles de la clinique des Cèdres à Échirolles restent pour l’heure ouvertes la nuit, mais pour combien de temps encore ? L’impact de ces fermetures se reporte aussi sur d’autres services de soins. Ainsi, tous les soins d’urgence sont censés passer par le 15, qui a déjà du mal à répondre à la demande. Sur le parvis du CHU, un tri des patients est effectué par les bénévoles de la protection civile et de la Croix-Rouge, dont ce ne sont normalement pas les missions. Les services de SOS Médecins, dont les actes sont trop peu rémunérés, sont eux aussi débordés.

Cette crise était pourtant prévisible, les hôpitaux ne pouvant absorber continuellement les patients renvoyés ailleurs. La charge de travail pour les équipes restantes est devenue ingérable. Selon la fédération hospitalière de France, plus de 90 % des établissements, toutes catégories confondues, faisaient remonter une fatigue importante parmi les équipes. Le taux d’absentéisme a quant à lui atteint les 10 % en 2021, témoignant d’un épuisement chronique. Les candidats ne se pressent pas pour les remplacer : 80 % des établissements disent rencontrer des difficultés permanentes à embaucher.

Ces chiffres terribles et les conséquences gravissimes pour la santé des Français ne sont pas la conséquence de problèmes conjoncturels, comme l’épidémie de Covid-19, mais bien d’une politique d’austérité et de mépris pour les revendications des soignants qui dure depuis des années. Pendant deux ans, le Gouvernement n’a parlé que du Ségur, que les syndicats et collectifs de soignants ont dès le début considéré comme insuffisant pour remédier à la crise généralisée. Les conclusions de la « mission flash » menée au printemps 2022 contiennent quant à elles des pistes intéressantes pour gérer cette crise, mais seulement à court terme.

Afin que les nombreux soignants qui réfléchissent à abandonner leur métier ne partent pas à leur tour et que la crise de vocation prenne fin, des perspectives claires doivent leur être données. Un véritable plan complet de reconstruction de l’hôpital public, qui fournisse des moyens humains et financiers enfin à la hauteur des besoins et abandonne la gestion purement budgétaire de la tarification à l’acte, apparaît plus urgent que jamais. Ainsi, il l’interroge sur les projets à long terme du Gouvernement pour remédier à la crise hospitalière.

2/ Manque de places en études de médecine dans l’académie de Grenoble :

M. Guillaume Gontard attire l’attention de Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche sur le manque de place en études de santé dans l’académie de Grenoble.

Dans un contexte marqué par le manque criant de personnel au sein du système de santé, représentant une menace importante pour la santé de nos concitoyens, le Gouvernement a mis fin au numerus clausus et engagé une réforme des études de santé, dont la mise en place a débuté lors de l’année scolaire 2020-2021. Malgré ces avancées, les étudiants font face à de nombreuses difficultés d’ordre psychologiques, financières et sociales, comme le rappelle l’antenne iséroise du collectif parcours d’accès santé spécifique-licence option accès santé (PASS-LAS).

Si les capacités d’accueil ont augmenté dans certaines académies, d’autres, comme celle de Grenoble n’ont pas vu leur situation évoluer, alors même que cette académie, regroupant l’Isère, l’Ardèche, la Drôme et les deux Savoies, nécessite d’importants effectifs de personnel de santé, en particulier l’hiver, en raison des accidents dans les stations.

Ce manque de places interroge, notamment à travers la comparaison avec l’académie de Lyon. Pour des besoins en effectifs sont comparables, l’académie de Grenoble n’offre cette année que 110 places en deuxième année de PASS et 30 en LAS, pour respectivement 1 100 et 693 inscrits, lorsque l’académie du Rhône en propose 658 en PASS et 95 en LAS, pour 1 675 et 373 inscrits. Cette situation, avec la mise en place de l’algorithme Parcoursup, compromet l’égalité des chances : un étudiant a quatre à cinq fois plus de chances d’accéder à la deuxième année à Lyon qu’à Grenoble. Dans un tableau de comparaison entre universités, le magazine L’Obs (édition du 10 au 16 février 2022) rappelle ainsi que l’académie de Grenoble n’a que 5,3 % de réussite en première année, ce qui constitue, de loin, la pire performance de France, Outre-mer compris.

Afin de remédier aux difficultés identifiées, le collectif PASS-LAS propose d’augmenter le taux d’admission de 5 % à 30 % pour les primants de la faculté de Grenoble, de permettre le redoublement d’étudiantes et étudiants sur cette session, d’attribuer des coefficients équitables en fonction des options choisies, enfin, d’harmoniser les règles d’admission d’une académie à l’autre.
Aussi, il lui demande si le Gouvernement entend créer de nouvelles places en deuxième année de médecine sur l’académie de Grenoble et comment il entend mettre fin aux inégalités injustifiables entre académies.