Le 11 avril, je suis intervenu au nom du groupe écologiste pour soutenir la proposition de loi de mes collègues du groupe RDSE proposant d’assouplir les règles d’implantation de pharmacies pour qu’elles puissent également s’établir dans des petites communes. Si ce texte est positif, j’ai également rappelé la nécessité de lutter contre les pénuries de médicaments en encadrant bien plus l’industrie pharmaceutique. Ce texte a été adopté.

Vous pouvez retrouver mon intervention en vidéo et sous format texte ci-dessous :

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Mes chers collègues,

En à peine 10 ans, notre pays a perdu 1800 pharmacies. Certes, il en reste encore 20.000, mais malheureusement la tendance à la baisse devrait se poursuivre. Depuis la réforme des études de santé il y a trois ans, la chute des effectifs dans les facultés de pharmacie est inquiétante : sur l’année scolaire passée, 1100 places, soit 27% du total, sont restées vacantes ! Or, l’âge moyen des pharmaciens est en hausse et nombre de départs en retraite risquent de ne pas être remplacés.

Tandis que l’offre de pharmacie se réduit, les besoins augmentent. D’une part, car notre population vieillit. D’autre part, car le nombre de missions confiées aux pharmaciens s’accroît régulièrement : tests médicaux, vaccinations, prescriptions médicales, télémédecine ou tout simplement conseils de santé délivrés à ceux qui ne peuvent aller chez un médecin. Avec la multiplication des déserts médicaux, les pharmaciens sont de plus en plus sollicités pour compléter l’offre de santé. Si cette évolution conforte les pharmaciens dans le sens de leur travail, nous devons lutter contre les déserts pharmaceutiques. 

En effet, ce phénomène est bien réel. Avec la multiplication des missions, les pharmaciens tendent à se regrouper dans de grandes officines, qui se concentrent naturellement dans les plus grandes communes. Les zones rurales risquent de se retrouver sans pharmacie de proximité. En Auvergne-Rhône-Alpes, l’Union régionale des professionnels de santé a sonné l’alarme : sur les 53 pharmacies recensées qui sont déjà seules dans un rayon de 15 minutes, la moitié pourraient fermer prochainement ! Faudra-t-il bientôt faire une demi-heure de route pour récupérer ses médicaments ? Hélas c’est déjà le cas pour nombre de nos concitoyens. Comment espérer alors rendre des communes rurales attractives si des services aussi essentiels y ont disparu ?

Face à cette menace, votre texte propose une mesure intéressante : autoriser l’ouverture de pharmacies dans des communes de moins de 2500 habitants si ce seuil est atteint en regroupant plusieurs communes limitrophes sans pharmacies. C’est une première réponse à la désertification pharmaceutique. Aussi, nous saluons cette PPL de Mme Maryse Carrère et de ses collègues du groupe RDSE. L’évolution du texte en commission est mitigée : sous la pression des lobbys, la nécessité d’avoir une commune de 2000 habitants dans la zone concernée a été maintenue. Nous regrettons sans nuance cette manœuvre qui limite malheureusement la portée de ce texte. Nous saluons toutefois le fait d’inscrire l’application de cette mesure dès octobre, qui remédie à l’absence de publication de décrets par le gouvernement, si souvent observée par le passé.

Cette PPL répond aussi à la problématique des propharmacies, ces officines tenues par des médecins dans des zones rurales, comme celle de Clelles dans ma région du Trièves. Si ce type de structure pallie un manque de services, il pose un léger conflit d’intérêt auquel il est utile de remédier. Ainsi, cette proposition de loi est positive pour nos concitoyens ruraux, qui ont droit à des services de santé de proximité.

Ce débat illustre d’ailleurs la nécessité de réglementer l’installation des professionnels de santé sur les territoires. Si les critères doivent parfois évoluer, l’encadrement par la loi de la répartition territoriale des pharmaciens permet d’éviter la formation de vastes déserts médicaux. J’invite donc mes collègues réticents à cet encadrement à reconsidérer leur position, afin de permettre à tous les Français d’avoir des médecins près de chez eux.

Enfin, après la pénurie de médecins et de pharmaciens, il est urgent de nous pencher sur celles de médicaments. Leur nombre a explosé ces dernières années, y compris pour des produits aussi courants que le paracétamol. Nous ne pouvons plus nous contenter de distribuer des subventions aux entreprises pharmaceutiques en espérant qu’elles relocalisent leurs usines. Nous devons avoir des garanties concrètes d’emplois et de production. C’est dans cette optique que nous avions soutenu la création d’un pôle public du médicament et des produits de santé de nos collègues du groupe CRCE.

Ainsi, nous soutenons cette proposition de loi, et vous appelons mes chers collègues à adopter à la fois l’amendement de la rapporteure Guylène Pantel et ceux de notre collègue Cédric Vial pour conforter la nécessaire portée de ce texte. Nous espérons ensuite que ce texte donne lieu à une réflexion plus large sur l’organisation de l’industrie pharmaceutique et de la santé en général, qui n’a que trop tardé. Je vous remercie.

Crédits photo : Dima Mukhin