Dans une période de forte inflation et où la précarité ne cesse d’augmenter, l’augmentation des frais de mandat des députés et des sénateurs a légitimement suscité une intense controverse ces derniers jours. Après l’annonce d’une hausse de 300€ mensuels d’allocation de frais de mandat (AFM) des députés courant janvier, les médias ont rappelé que le Sénat a pris une décision similaire le 16 novembre 2023, avec une hausse de 700€ par mois. Étant donné qu’il s’agit d’argent public, et conformément à mes engagements de transparence, je souhaite vous donner le contexte de cette augmentation et vous décrire son usage.
Tout d’abord, il faut préciser ce qu’est l’AFM. Cette avance n’est pas la rémunération des sénatrices et sénateurs, mais bien des crédits accordés pour diverses dépenses relatives à l’exercice de leur mandat. Il s’agit par exemple de moyens permettant de louer une permanence en circonscription, de payer des déplacements, des frais d’impression et d’affranchissement postal, de rémunérer des stagiaires, de régler divers cotisations et abonnements presse ou encore d’acquérir du matériel informatique. Il n’est par contre pas autorisé pour des raisons évidentes d’équité et de contrôle de faire des dons (sauf adhésion pour des sommes très modiques) à des associations de son choix. Les crédits non consommés sont automatiquement rendus au Sénat, et cela est fréquent. Enfin, toutes ces dépenses doivent être justifiées, moyennant un contrôle régulier des services du Sénat.
Ainsi, je ne souscris pas au discours anti-parlementariste et parfois populiste qui, souvent avec beaucoup d’amalgames, considère que les élus seraient trop payés. Si le niveau de rémunération peut être discuté, le bon exercice d’un mandat parlementaire a un coût, à la fois pour se rendre le plus souvent possible sur le terrain, mais aussi pour assurer aux élus un niveau de vie suffisant pour qu’ils ne soient pas sensibles à la corruption ou uniquement issus des couches les plus riches de la population. Par ailleurs, exercer un mandat électif suppose d’arrêter son activité professionnelle, qui n’est pas toujours simple à reprendre par la suite.
Ces précisions étant faites, pourquoi l’enveloppe de frais de mandat a-t-elle augmenté de 700€ ? Il s’agit là d’une proposition de la majorité sénatoriale pour tenir compte de l’inflation et d’une hausse sans précédent des frais de logement. La dernière revalorisation remontait en effet à 2018 et les prix ont sensiblement augmenté, notamment en ce qui concerne le carburant et les nuitées d’hôtels à Paris, renchéris par le dynamisme touristique et le contexte des Jeux Olympiques.
Ainsi, si cette augmentation ne me paraît pas injustifiée, je comprends pleinement qu’elle interroge vu le contexte socio-économique, marqué par une précarisation croissante des Françaises et des Français. Si les parlementaires ont droit à une augmentation pour leur fonctionnement qui tienne compte de l’inflation, il doit en être de même pour le reste de la population. C’est pourquoi je plaide régulièrement pour une hausse des rémunérations, notamment par le relèvement du SMIC, ainsi que pour l’indexation des salaires et des prestations sociales sur l’inflation. Il aurait été souhaitable que la droite sénatoriale fasse preuve de la même cohérence, plutôt que de demander continuellement des économies supplémentaires sur les services publics et la protection sociale.
Je souhaite également vous informer de l’usage que je compte faire de ces 700€ supplémentaires. Avec le reste de mes collègues du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, nous avons décidé de mettre à profit cette augmentation pour renforcer notre équipe et embaucher deux collaborateurs.trices supplémentaires. Cet apport sera fort utile pour un petit groupe comme le nôtre (16 membres), qui doit réaliser le même travail parlementaire que des groupes plus importants, malgré des moyens assez faibles, qui ne nous permettent pas, par exemple, d’avoir un.e collaborateur.trice par commission. Ainsi, ces moyens supplémentaires seront directement mis au service de notre travail parlementaire.
Enfin, je tiens à rappeler que j’ai fait le choix, dès mon élection en 2017 et alors que ça n’est pas obligatoire, de publier l’intégralité de mes frais de mandat sur mon site internet. Cette transparence me paraît être un devoir démocratique évident, afin de vous permettre de consulter l’usage de ces fonds et peut-être d’interroger certains choix. C’est d’ailleurs dans cet esprit que le groupe Ecologiste – Solidarité et Territoires, que j’ai l’honneur de présider, a demandé une totale transparence sur le régime de retraites des sénatrices et sénateurs, ainsi que la suppression du régime spécial. Une demande qui a donné suite à une décote de 20% des pensions de retraites et l’instauration d’un plafond maximum.
Espérant avoir répondu aux interrogations que suscite cette hausse, je continuerai à exercer mon mandat avec transparence et à me battre pour une indexation des salaires sur l’inflation, une rémunération décente pour tous et une protection sociale renforcée.