Déficitaire depuis plusieurs années et profondément touchée par le manque de neige en raison du changement climatique, la station de l’Alpe du Grand Serre (Isère) avait finalement été sauvée in extremis pour une dernière saison l’hiver 2024-2025. Désormais, elle vient de mettre la clé sous la porte, le plan pour la développer plus en altitude n’ayant pas réussi à réunir les 18 millions d’euros nécessaires. Pour les habitants de la Morte, où est située la station, c’est une page majeure de l’histoire du village qui se tourne dans la douleur, avec environ 200 personnes qui vivent du ski, directement ou indirectement (épiceries, restaurants, colonies de vacances, loueurs de matériel…).

Comme le rappelle Coraline Saurat, la présidente de la communauté de communes de la Matheysine dans Le Monde, « c’était difficile d’imaginer l’après quand on a tenté jusqu’au bout de maintenir le ski. » Ayant alerté sur cette impréparation il y a déjà un an, je ne peux que partager ce constat regrettable. Avec l’accélération du changement climatique, ces fermetures de stations dans l’urgence commencent déjà à se multiplier. Le 28 juin, les habitants d’Allos (Alpes de Haute-Provence) se sont prononcés pour une fermeture de leur station, le maintien ayant impliqué une forte hausse des impôts locaux. A Chamrousse, une consultation citoyenne sur l’avenir de la station vient de s’ouvrir. Partout, les réflexions s’engagent, les élu.es et les collectifs citoyens imaginent l’avenir de leurs territoires.

A chaque fois, nous ne pouvons que regretter le manque d’accompagnement et d’écoute, qui place les communes, les élus locaux et les habitants dans une grande difficulté. Si l’activité de sports d’hiver peut parfois être partiellement maintenue en adaptant le modèle économique, la préparation à la fin du modèle ski est impérative pour les stations de moyenne montagne, qui vont toutes être touchées par le manque de neige à court terme. Je n’ignore rien du fort attachement au ski et du poids économique de cette activité dans les communes concernées et comprends pleinement les nombreuses réticences et inquiétudes. Mais le déni climatique n’est plus possible : même avec des canons à neige (dont l’impact environnemental et financier est très lourd), la fin du ski (comme pratiqué actuellement) est inéluctable pour les stations de moyenne montagne. En février 2024, la Cour des Comptes alertait déjà sur le risque de faillite de ces stations et prônait des mesures fortes pour changer de modèle. D’après l’association Mountain Wilderness, 200 stations ont déjà dû fermer en France et cette liste ne va faire que s’allonger.

Heureusement, nos territoires de montagne regorgent de créativité et de potentiel et le monde associatif ne manque pas d’idées pour envisager l’avenir. Au Plateau des Petites Roches (Isère), la fermeture du funiculaire (activité complémentaire l’été) suite à un éboulement en 2022 et le manque d’enneigement ont obligé à fermer la station de ski, qui a pu rouvrir en fonction de l’enneigement grâce à l’action de bénévoles de l’association Agile, grâce à beaucoup de débrouille, au soutien de la mairie et à une vision à 360 degrés sur l’avenir de la commune.

Dans le Vercors, l’association Vercors en Transition réfléchit aussi à de nombreuses possibilités pour l’avenir. Il faut notamment réfléchir urgemment à développer d’autres activités, touristiques (notamment l’été), mais pas seulement. Le retour d’activités agricoles (maraîchage, pastoralisme, herboristerie…) et d’artisanat doit notamment figurer parmi les priorités, comme nous l’avions évoqué dans un débat que j’avais organisé à ce sujet l’été dernier. Il convient également de réinterroger la vie au pays en termes de services publics (mobilités, santé,…), d’activités culturelles, de soutien au tissu associatif et aux initiatives citoyennes. L’avenir des montagnes se construira au cœur des montagnes. 

Bien évidemment, cette transition ne sera pas simple. Mais l’énergie associative et citoyenne et le volontarisme des élus locaux est un point d’appui très fort. Malheureusement, l’Etat est le grand absent de cette transition. Dernièrement, et notamment grâce à la mobilisation du réseau de l’Association Nationales des Élus de Montagne (ANEM), nous avons réussi à sauver le FNADT, outil essentiel de financement de l’aménagement de la montagne, dans le budget 2025, puis l’existence du Conseil National de la Montagne, dont la suppression était envisagée dans le Projet de loi de simplification. 

Mais ces outils restent insuffisants : il nous faut au plus vite des moyens pour la transition en montagne. Dans le budget 2025, j’avais déposé un amendement de solidarité pour créer un fonds de péréquation entre les stations, financé par une part de la taxe sur les remontées mécaniques, afin que les grosses stations financent une partie de la transition de celles qui sont en difficulté, comme le préconise la Cour des Comptes. Cet amendement a malheureusement été rejeté mais je le déposerai à nouveau. Plus largement, il me semble que le temps est venu d’établir un grand plan national de transition de la montagne, notamment pour les stations dont les jours sont comptés, comme l’Etat avait su le faire avec le plan Neige dans les Trente Glorieuses. 

Vous pouvez en tout cas compter sur ma détermination totale à m’investir sur ce sujet par tous les moyens à ma disposition, et toujours en lien avec les élus locaux, les habitants et le monde associatif.