Hasard du calendrier, les élections municipales sont venues donner une force démocratique considérable aux propositions de la Convention citoyenne pour le Climat. Alors que la droite hurlait au manque de légitimité démocratique du tirage au sort et de la participation citoyenne, la vague écologiste des élections municipales permet de clore, sans plus attendre, ce faux procès.

Je réaffirme ici mon soutien aux travaux de la Convention, bel exercice démocratique, qui aboutit sur un ensemble de mesures cohérent. Je me félicite de voir que lorsque l’on réunit des citoyen.nes de tout horizon pour réfléchir au défi climatique et environnemental, ils/elles aboutissent sur des propositions qui ressemblent à celle de la gauche écologiste. Rien n’est plus fort qu’une idée dont l’heure est venue comme disait l’autre.

Le président de la République ne s’y est pas trompé, en programmant dès ce matin sa rencontre avec la Convention et ses annonces, il prend la balle au bond, évite que l’on s’attarde trop sur la débâcle de la majorité et sur la percée historique des écologistes, et tente de reprendre la main sur l’agenda politique. C’est habile, pas très élégant, mais habile.

Ainsi, la vague verte (mais aussi rose et rouge) oblige le président à tenir sa promesse et à reprendre 146 des 149 mesures proposées par la Convention qui seront prises par décret dans l’été pour le volet réglementaire, soumises au Parlement à la rentrée, pour le volet législatif, par référendum pour le volet constitutionnel (et éventuellement pour le volet législatif si le Parlement rognait sur les ambitions de le Convention), portées auprès des associations d’élus locaux ou des institutions européennes pour les volets locaux et européens. Sur le papier, la promesse de reprendre sans filtre les conclusions des travaux de la Commission semble à peu près tenue.

Un mot tout de même pour regretter une nouvelle fois que le président de la République vienne filtrer les propositions de la Commission, même si le tamis était large. On en reste au fait du prince qui décide de ce qu’il veut. Il aurait été préférable, pour tout ce qui ne relève pas de l’Europe et de l’International, que les propositions soient transmises sans filtre au Parlement et/ou au référendum. Notre monarchie présidentielle perdure et cet exercice démocratique n’y change pas grand-chose…

Car les propositions qu’Emmanuel Macron rejette comptent parmi les plus fortes de celles proposées par la commission. Je ne pense pas à la réduction des 110 km/h sur l’autoroute car je crois qu’il est de bon aloi de la conserver pour plus tard, elle n’est pas mûre et risque de parasiter complètement le débat public. On pourra réfléchir à la réduction de la vitesse autoroutière quand on aura développé les alternatives à la voiture et quand on aura renationalisé les autoroutes. Ainsi, on pourra réduire la vitesse en contrepartie d’une baisse des tarifs de péages ce qui permettrait d’allier écologie et justice sociales.

Je pense au refus de modifier le préambule de la constitution, au refus de reconnaître le crime d’écocide, au refus de taxer les dividendes des actionnaires. De ce fait, Emmanuel Macron confirme, même si on n’avait pas beaucoup de doutes, qu’il n’a pas du tout changé de paradigme politique : rien ne doit pouvoir entraver la liberté d’entreprendre. Rien, pas même une taxe de 4 % sur les dividendes des actionnaires. 4% des 50 milliards de dividendes que versent annuellement les entreprises du CAC 40 à leurs actionnaires rapaces, ça faisait 2 milliards d’euros par an pour la transition. C’était plus symbolique qu’autre chose, mais trop symbolique pour le président des riches. On ne va quand même pas taxer les magnats du pétrole, les fonds de pensions américains et les milliardaires français, qui vivent de la rente de nos entreprises…

Reconnaître les droits du vivant dans la Constitution, reconnaître l’écocide, c’était donner des moyens juridiques importants aux ONG et aux citoyen.nes pour traduire en justice les entreprises qui polluent éhontément. Ce n’était certainement pas « faire primer les droits de la nature et sur les droits de l’humain » comme l’explique le président, qui refuse obstinément de comprendre que les droits de la nature SONT les droits de l’humain. Cette opposition philosophique entre la vie humaine et le reste de la vie est le fondement délétère du productivisme. Aucun projet écologique ne pourra jamais être bâti sur une telle vision du monde. En proposant de produire plus, de travailler plus, le président ne propose pas de vision écologique.Il propose des mesures qui corrigeront les pires méfaits du capitalisme avec l’objectif de lui permettre de survivre.

Entendons-nous, en politique, surtout en démocratie, les choses évoluent lentement et « un tiens vaut mieux que, deux tu l’auras ». J’approuve toutes les mesures proposées par la Convention et reprises par le président, elles vont dans le bon sens. En tant que parlementaire, je me mobiliserai avec toute mon énergie pour que le Parlement préserve, voire amplifie la portée de ces mesures. Mais je me fais peu d’illusions, car nombre de ces mesures ont déjà été retoquées faute de majorité écologiste au Parlement.

Il n’y’aura pas de tournant écologique du quinquennat. Pour voir advenir un tournant écologique qu’on ne peut plus attendre, il faut voter pour la gauche écologiste. Hier nombre de grandes villes françaises ont fait ou refait ce choix et je m’en félicite, demain il faut poursuivre cette dynamique avec les sénatoriales, les régionales, le départementales et surtout la présidentielle et les législatives.