Dans de nombreux collèges isérois, pour la plupart classés Réseau d’Education Prioritaire (REP) ou REP+, le nombre d’heures d’enseignement prévu pour la prochaine rentrée scolaire est en baisse. De nombreux enseignants et parents d’élèves s’en inquiètent et ont exprimé leur incompréhension, notamment par le biais d’interpellation du rectorat d’académie ou de grèves. Si le cas du collège Lucie Aubrac, situé à la Villeneuve de Grenoble, a été médiatisé, le même problème touche aussi d’autres établissements à Grenoble, Mens, Fontaine, Villefontaine, Bourgoin-Jallieu ou Vizille.

La crainte des parents et des enseignants d’une nouvelle dégradation des conditions de travail et d’apprentissage est légitime : si cette baisse est appliquée, les classes seront encore plus chargées, des options supplémentaires proposées aux élèves disparaîtront et la mixité sociale risque de diminuer encore davantage. A la suite de nombreuses interpellations de la communauté éducative, j’ai donc écrit plusieurs courriers au ministre de l’Education nationale et déposé une question écrite pour comprendre les raisons d’une telle décision et lui demander d’y renoncer, afin de garantir de bonnes conditions d’enseignement.

Vous pouvez lire ma question écrite sur le site du Sénat :

M. Guillaume Gontard interroge M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur la dotation horaire globale (DHG) prévue pour l’année scolaire 2023-2024 dans le département de l’Isère. À Grenoble, Villefontaine, Bourgoin-Jallieu, Vizille ou encore Fontaine, les prévisions de DHG réalisées par le rectorat d’académie sont en effet particulièrement inquiétantes pour de nombreux établissements, dont la plupart sont situés en zone d’éducation prioritaire. Le rectorat semble avoir fait le choix de supprimer toute marge horaire supplémentaire pour différents collèges, considérant que les dispositifs « réseau d’éducation prioritaire », REP ou REP+, étaient suffisants.

Cette décision a trois effets négatifs majeurs. D’abord, elle va compliquer les conditions d’enseignement des professeurs, avec des classes chargées au maximum, c’est-à-dire de 25 élèves pour les établissements d’éducation prioritaire. Il s’agit d’un mauvais signal envoyé aux enseignants, dont le métier attire de moins en moins : les candidatures au certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré (CAPES) et à l’agrégation ont fondu de moitié en 15 ans. Cette surcharge va également compliquer l’apprentissage des élèves, alors que la France détient pourtant déjà le record du nombre d’élèves par classe de toute l’Union européenne.

Dans certains établissements, comme le collège Lucie Aubrac à Grenoble (REP+), cette politique risque de mener à une ghettoïsation. En effet, l’établissement est encouragé à augmenter le nombre de dérogations sortantes et à restreindre celles entrantes pour limiter le nombre d’élèves à 25 par classe. Ainsi, les familles qui veulent choisir d’autres établissements y sont encouragées, tandis que celles qui veulent y placer leurs enfants ne peuvent le faire. Or, ces transferts entre établissements sont toujours marqués par des dynamiques de classes sociales et jouent fortement sur la mixité.

Enfin, ces baisses du nombre d’heures d’enseignement risquent de faire disparaître des options complémentaires comme du soutien scolaire, des cours dédoublés, des classes aménagées théâtre, des sections internationales, etc. Autant de dispositifs qui contribuent à l’épanouissement quotidien des élèves et leur permettent d’accroître leur capital culturel.

Les choix du rectorat de l’académie de Grenoble sont donc contraires à « la lutte contre les inégalités sociales », pourtant définie comme « le premier axe » de la politique d’enseignement lors du dernier remaniement. Ainsi, il souhaite connaître les raisons de cette décision brutale concernant la DHG. Il lui demande également d’intervenir pour rétablir les moyens nécessaires à l’égalité des chances et au bon fonctionnement des établissements en question.