Le Sénat a examiné la création de l’Office Français de la Biodiversité (OFB) qui doit fusionner au 1er janvier 2020 l’ancienne Agence Française pour la Biodiversité (AFB) avec l’Office Nationale de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS). Porteur de l’espoir d’intégrer la chasse dans le giron de la préservation de la biodiversité, ce projet de loi était attendu par l’ensemble des acteurs de l’environnement mais a fait l’objet d’une offensive et d’un lobbying pro-chasse très important lors de son passage au Sénat. Offensive d’autant plus incompréhensible que ce texte au sortir de l’assemblée national semblait faire consensus.

L’enjeu est effectivement de taille, grâce à ses territoires d’outre-mer, la France accueille près de 10% des deux millions d’espèces connues dans le monde alors que nombre d’entre-elles sont menacées d’extinction à court ou moyen termes. La France a déjà perdu un tiers de ses espèces d’oiseaux en 15 ans. Le réchauffement climatique pousse certaines espèces animales à changer d’aires de répartition et contribue ainsi à une déstabilisation des écosystèmes territoriaux.

Retrouvez-mon intervention en discussion générale :

Le point noir de ce projet de loi repose, comme toujours dans l’absence de financements supplémentaires octroyés au nouvel organisme. Du fait, notamment de la réduction du prix du permis de chasse, le nouvel organisme est créé avec un déficit annuel de près de 40 millions d’euros. La ministre particulièrement peu rassurante, a renvoyé le projet aux prochaines lois de finance. Du coup, il est à peu près certain que le Gouvernement comblera ce déficit en ponctionnant davantage le budget des Agences de l’eau, aggravant encore un peu la rupture avec le principe de “l’eau paie l’eau”. Ce dernier visait à sanctuariser les financement et investissements d’assainissement de l’eau alors que la qualité de cette ressource ne cesse de se dégrader.

Mon intervention pour la défense du budget des Agences de l’eau :

L’autre drôle de surprise à laquelle nous avons assisté est l’intense lobbying mené par les chasseurs qui a fait irruption entre le passage du texte de l’Assemblée nationale au Sénat. Alors que le Gouvernement avait pourtant assuré aux associations écologistes que ce projet de loi ne serait pas l’objet de débats sur la chasse, les sénateurs, de gauche comme de droite,  en ont décidé autrement. Le projet de loi est ressorti de la Commission déformé par un lobby de la chasse qui a trouvé de nombreux relais sur les bancs du Sénat.

J’ai donc défendu plusieurs amendements avec mon groupe Communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE) pour revenir sur des dispositions aussi dangereuses que malvenues dans un texte sensé nous doter d’une nouvelle instance de préservation de la biodiversité.

Je me suis opposé à la modification du nom de l’Office Français de la Biodiversité auquel le Sénat a fait rajouter “et de la Chasse”, comme si cette dernière n’était pas concernée par la préservation de la biodiversité, comme si elle était plus importante que tous les autres usages de la nature :

J’ai défendu un amendement pour exiger une représentation majoritaire de l’État dans le conseil d’administration de la nouvelle institution. Outre les prérogatives de polices du futur office qui le justifient, 80% de la biodiversité nationale se trouvant dans les Outre-Mers, il me paraît important que les collectivités territoriales y soient largement représentées. Je me suis également opposé à ce que la loi accorde 10 % des sièges du conseil d’administration aux fédérations des chasseurs et de pêcheurs :

Alors que nous avons tenté d’interdire avec le groupe CRCE les techniques de chasses barbares comme la chasse à la glu qui engendre de nombreux dégâts collatéraux, j’ai également défendu un amendement pour attribuer à l’OFB une mission de contrôle et de collecte des données de prélèvements de chasse. Comment réguler la chasse et préserver la biodiversité si on est incapables de la mesurer ? Sans ces informations, les missions de l’office deviennent caduques.

Mon intervention :

Malgré cela nous avons pu faire adopter un amendement proposé par Réserve naturelle de France (RNF) pour revaloriser les pouvoirs de police des officiers de police judiciaire environnementale. Ces derniers étant actuellement chargés de lutter contre les atteintes à la biodiversité dans un cadre réglementaire très restreint.

Mon intervention :

J’ai également défendu deux amendements pour lutter contre la pollution génétique des écosystèmes. Le premier vise à restreindre la pratique de l’agrainage des sangliers qui consiste à les nourrir en période de vulnérabilité pour augmenter la population disponible à la chasse. Les chasseurs étant rarement en capacité de faire face à l’afflux de population, la pratique entraîne une surpopulation de sangliers qui déstabilise les écosystèmes. Le second amendement étend l’obligation du recensement des relâchers d’animaux aux espèces de petits gibiers de plaine. Ces relâchers dans la nature à des fins de chasse concernent entre 10 et 30 millions d’animaux chaque année et sont responsables de pollution génétique de la faune sauvage. Ils sont actuellement difficilement mesurables.

Mes interventions contre l’agrainage des sanglier…

et pour l’extension de la collecte des données relatives aux relâchers d’animaux :

En l’état je n’ai pas pu voter ce texte tel que modifié par le Sénat. Néanmoins, soucieux de soutenir la création de cet office que nous appelons de nos vœux et d’envoyer un message en faveur de la préservation de la biodiversité, je me suis abstenu avec le groupe CRCE.